Quelques conseils pour entreprendre avec succès aux États-Unis

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Pascale Longuet est avocate bilingue (français et anglais), membre des barreaux de Paris et New York. Son cabinet représente une clientèle essentiellement francophone de start-ups et de taille intermédiaire, ainsi que des particuliers français et américains.

Cet article est le fruit d’une longue expérience de conseil aux sociétés qui souhaitent entreprendre aux États-Unis, qu’il s’agisse d’implantations de filiales, de créations de réseaux de ventes, ou d’accompagnement dans l’évolution d’entreprises existantes.

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Bien préparer son projet

En amont, un projet d’implantation aux États-Unis doit se préparer sérieusement dans la durée, avec une bonne connaissance de l’environnement américain, et du marché d’un produit ou service donné. Ceci signifie des visites sur place, l’établissement d’un business plan, une idée aussi précise que possible des démarches à accomplir aux États-Unis, de leur durée et de leurs coûts. Un projet doit correspondre à la demande du marché local avec lequel il faut se familiariser. S’implanter aux USA est une étape importante : autre langue, autre continent, autre culture, autre pays pour lequel il faut obtenir un visa d’immigration, et qui a un système juridique particulier.
À ce jour, il faut retenir que l’administration américaine est parcimonieuse dans la délivrance de visas d’immigration, et que ceux-ci ne sont accordés qu’après de longues semaines d’attente.

Un projet doit être adapté selon la réalité du marché et des clients potentiels concernés. Ceci passe parfois par des changements de couleurs d’un produit et de son emballage, toujours de ses dimensions, et la prise en compte de la souplesse des services clients aux États-Unis, ainsi qu’en matière des retours de marchandises. La clientèle américaine est généralement volatile.

En matière de ventes, le client doit connaître le bon circuit de vente de ses produits et les us et coutumes qui s’y appliquent. Ainsi dans certains secteurs, des agents commerciaux demanderont des taux de commission spécifiques au secteur.

Il est fondamental pour une société non américaine d’éviter de s’engager et de vendre ses produits aux États-Unis sans avoir bien négocié ses conditions générales de vente.

Disposer d’un budget réaliste pour être bien assisté

Une implantation s’effectue avec l’assistance au minimum d’un expert-comptable et d’un ou plusieurs avocats de compétences différentes (droit des affaires et immigration par exemple), et ce sans compter des courtiers en immobiliers, et en assurances. Les honoraires de tous ces conseils sont à prendre en compte au départ d’un projet, et doivent être budgétisés. Les services d’un gros cabinet d’avocat sont très coûteux. Des cabinets plus petits, voire d’avocats indépendants, sont plus économiques et fournissent davantage des prestations d’accompagnement. Les clients ont aussi l’assurance d’avoir toujours à faire au même interlocuteur, gage d’efficacité puisque cette personne connaît le dossier. Ce n’est pas toujours le cas des grosses structures qui utilisent fréquemment les clients de taille modeste pour permettre à leurs collaborateurs juniors « de se faire les dents » au détriment parfois de la qualité du service rendu. Les cabinets plus petits pourront en revanche demander une rémunération pour le temps passé à fournir des informations, et auront souvent besoin de travailler avec d’autres conseils.

Le montant des prestations d’établissement, de revue, de négociations de contrats sont difficiles à estimer, car dépendant beaucoup de la vitesse et de la nature des échanges entre les co-contractants.

Il existe en France et aux États-Unis, de nombreux interlocuteurs à la disposition des entreprises, et des personnes qui non seulement ont pour mission de filtrer les projets, mais aussi d’assister les investisseurs potentiels dans la préparation des projets et parfois leurs financements.

Prendre conscience de l’omniprésence du droit aux États-Unis

Le droit américain, basé sur la «Common Law», et non le code civil, est particulièrement complexe du fait de la superposition de lois fédérales, de réglementations étatiques et parfois locales. Il existe ainsi 51 systèmes d’organisation judiciaires différents, un par État plus le système fédéral. De plus, il y a dans la culture américaine une tendance procédurière marquée. Chacun doit bien savoir quelles formalités et/ou licences sont applicables à son secteur d’activité (ainsi la société qui s’engage dans la vente de vins et spiritueux sans disposer des licences nécessaires et sans avoir consulté de conseil compétent en la matière), agir et s’assurer en fonction des risques de la situation (la responsabilité du fabricant est très importante aux États-Unis).

La fiscalité est aussi un élément fondamental à prendre en compte. La France et les États-Unis sont liés par deux conventions fiscales qui ne s’appliquent qu’aux impôts fédéraux : une convention tendant à éviter les doubles-impositions en matière d’impôt sur le revenu et d’impôt sur la fortune ; une convention tendant à éviter les doubles-impositions en matière de successions et de libéralités. Seule la première de ces deux conventions concerne en règle générale les entreprises françaises qui s’implantent aux États-Unis. La grande majorité des états ont aussi un système fiscal parfois plus complexe que le système fédéral (cas de la Californie). Comme les États ne sont pas des entités politiques souveraines, les conventions fiscales conclues avec la France ne leur sont pas applicables.

Communiquer

Communiquer très régulièrement avec les conseils retenus sur l’état d’avancement d’un projet, une fois que l’entité juridique qui sert de véhicule à l’investissement est constituée. Du fait des distances et de la nécessité de faire avancer les situations, la communication aux États-Unis est omniprésente. Il est à cet égard toujours dangereux de « faire adapter » pour des raisons d’économie, des contrats de droit français ou étrangers par un interlocuteur qui n’est pas un juriste de droit américain.

Faire revoir les projets de contrats avant leur signature

Il est indispensable de faire revoir, avant sa signature, tout projet de contrat qui concerne une entité américaine, par un avocat de droit américain. Cette revue doit aussi couvrir comme de nécessaire les aspects fiscaux aux niveaux fédéral et local de la transaction envisagée.

Un client PME avait ainsi signé des contrats avec une société américaine pour la promotion et la vente de ses produits, sans jamais en avoir compris le texte car il ne parlait pas un mot d’anglais, et de surcroît sans avoir confié le dossier à un avocat compétent. Ces contrats prévoyaient en fait un transfert de la marque de fabrique du client à son cocontractant américain. Un contentieux a eu lieu à l’initiative de la partie américaine et pour récupérer sa marque, le client a dû verser $800,000.00, en sus de plusieurs centaines de milliers de dollars d’honoraires de conseils aux États-Unis et en France.

Il faut ici prendre conscience que les coûts des procédures contentieuses aux États-Unis sont fort élevés, notamment du fait de l’existence de la phase de « discovery », (échanges d’informations écrites et orales entre les parties). En contrepartie, plus de 95% des contentieux font l’objet de transactions amiables.

Suivre ses projets aux États-Unis

Pendant une période dont la durée est variable selon les entreprises, il est indispensable que les fondateurs d’une entité américaine lui consacrent du temps, en suivi, contacts et déplacements réguliers sur place. Cette démarche, est certes coûteuse en énergie, argent et temps, mais permet d’éviter notamment des situations de prise de contrôle effectif des affaires de la société américaine par un ou des dirigeants locaux, accompagnées parfois de détournement de fonds.

Voici les situations rencontrées dans deux dossiers. Dans l’un, le dirigeant de la filiale américaine venait régulièrement en France et invitait au restaurant le fondateur du groupe, devenu âgé, alors que personne ne venait aux États-Unis examiner les affaires de la filiale. Or, il s’est avéré que le dirigeant de la filiale et son épouse qui y était employée puisaient dans les caisses de la filiale. L’histoire s’est révélée fort onéreuse et déplaisante lors des licenciements qui sont intervenus.

Dans une autre situation, un groupe français s’était créé et développé aux États-Unis en confiant la direction et la gestion à une de leurs connaissances, qui détenait une participation minoritaire dans la société holding de la partie américaine du groupe. La confiance a régné, avec un éloignement quasi-total, entre la France et les États-Unis pendant plus d’une dizaine d’années. Pendant ce hiatus, le dirigeant du groupe américain a fait grandir ce groupe, en s’assurant qu’il avait toujours toute autorité sur chaque nouvelle entité, en tentant de faire signer des pactes d’actionnaires qui lui étaient favorables et d’écarter tout dirigeant désigné par la France. Ce dirigeant local utilisait également les ressources du groupe en sa faveur. Il a fallu des mois pour négocier les contrats appropriés pour mettre fin aux relations entre ce dirigeant, dont le pouvoir de nuisance était particulièrement élevé, et le groupe industriel.

Prendre l’initiative contractuelle

Dans un certain nombre de situations, la rencontre entre partenaires potentiels peut très rapidement se traduire par la présentation de termes contractuels américains à l’initiative de la partie locale et dont les conditions ne conviennent pas à l’esprit de la partie non américaine. Ici, il est important de réagir rapidement pour ne pas laisser s’enliser la situation et de tenter de rétablir des clauses mutuellement bénéfiques. En pratique, la démarche la plus saine est de prendre l’initiative du premier projet de document contractuel.

Pour illustrer ce propos, l’autre cas d’une société qui, à la suite d’un contact avec un partenaire américain, a reçu un projet de contrat détaillé, mais qui a attendu de nombreuses semaines avant de saisir un avocat américain de ses intérêts. L’ébauche du contrat a été modifiée, mais avec tellement de retard et de décalage qu’il n’y a pas eu de suite favorable.

Faire confiance

Cette liste n’est nullement exhaustive, la pandémie du COVID 19 a brutalement interrompu en mars 2020 le flot des transactions internationales et modifie encore à ce jour la rapidité et la fluidité des échanges. La circulation des personnes reste restreinte, ainsi que les opportunités de rencontres en personne. Les États-Unis restent cependant un énorme marché avec de grandes possibilités de réalisations et succès.

En conclusion : faites confiance à votre avocat, à vos conseils et à leurs réseaux de professionnels compétents pour vous guider avec expérience dans les travers et dédales d’un monde différent !

En espérant vous rencontrer un jour, et restant avec plaisir à vos dispositions.

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