Pascale Longuet, une avocate francophone à New York, spécialisée dans le droit des affaires

“Assister des entreprises au-delà de leurs frontières et de leur système de droit d’origine, souvent de droit civil, et de les guider au mieux aux Etats-Unis”. Une interview de Pascale Longuet, membre du French District.

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Qui êtes-vous et quelle est votre activité ?

Je suis avocate bilingue et biculturelle basée à Manhattan et membre des barreaux de Paris et de New York. Mon activité principale est l’assistance d’une clientèle de sociétés francophones en droit américain des affaires.

Pouvez-vous retracer les grandes lignes de votre parcours ?

Ma carrière professionnelle a débuté à Paris en tant qu’avocate stagiaire au barreau de Paris. J’étais alors titulaire d’une Maîtrise de droit des affaires et fiscalité de l’Université Paris II Assas et d’un Masters de droit (L.L.M.) obtenu à New York University, à New York. Après mon admission au barreau de New York en 1990, j’ai exercé plusieurs années dans des cabinets d’avocats à New York avant de commencer en exercice individuel.

Le cœur de mon activité est l’assistance d’entreprises françaises ou francophones dans de nombreux aspects de leurs opérations de droit des sociétés et transactions commerciales aux États-Unis. Plus précisément il s’agit de montages et constitutions de sociétés, de leurs réorganisations, d’acquisitions et cessions, et de la revue, négociation et rédaction de contrats. Ce volet comprend aussi des aspects de propriété intellectuelle comme les enregistrements de marque et des implications dans des domaines annexes du droit.

Je travaille en collaboration avec d’autres confrères spécialisés et professionnels du droit, en France et aux Etats-Unis, selon les besoins des clients et des dossiers, par exemple en matière de contentieux et d’arbitrage, de baux commerciaux, de droit du travail. Je précise ici que je ne pratique pas l’immigration américaine.

Le cabinet assiste aussi des particuliers qui sont français ou américains dans des domaines patrimoniaux dans lesquels il faut créer les liens, ou trouver la correspondance entre les systèmes juridiques et exigences de deux pays. Ainsi des liquidations de compte de retraite, d’assurances-vie, des situations de validations de jugements de tutelle pour débloquer et rapatrier des actifs, le traitement des aspects français de succession.

Pourquoi cette passion pour votre métier ?

Je considère avoir une grande chance d’être en mesure d’assister des entreprises au-delà de leurs frontières et de leur système de droit d’origine, souvent de droit civil, et de les guider au mieux aux Etats-Unis. Les investisseurs étrangers aux Etats-Unis font face à un environnement juridique fort complexe et litigieux, une culture différente, des us et coutumes qui peuvent être spécifiques à leur secteur d’activité, une clientèle volatile. Avoir la possibilité, au niveau individuel de pourvoir créer des liaisons, et des ponts entre des pays fort différents et des cultures de travail parfois fort éloignées l’une de l’autre, est passionnant.

Pour quelles raisons vous êtes vous expatriée ?

J’ai toujours eu une attirance et une curiosité pour les Etats-Unis, puis ai saisi l’opportunité d’un double cursus universitaire, et ai obtenu des admissions à deux barreaux. Il y a aussi eu le fait de côtoyer des avocats internationaux à Paris et à New York, et des circonstances personnelles.

Les éléments majeurs qui ont contribués à mon « séjour » aux Etats-Unis depuis plus de trente ans, résident certainement dans l’immense capacité américaine à être optimiste, faire confiance à la personne, accueillir et former.

En quoi la pratique de votre métier aux États-Unis est-elle différente de celle en France ?

Je suis partie de France depuis 35 ans et mon idée de la pratique du métier d’avocat en France est sans nul doute devenue plus distante.

De façon générale, aux Etats-Unis, l’accès au barreau est commun à tous les étudiants en droit. Chacun choisit ensuite son mode d’exercice de son titre et de ses compétences, dans des professions qui, en France, ne sont pas seulement celles de l’avocat, mais celles de nombreux auxiliaires de justice tels les magistrats, les notaires, les huissiers, les avoués.

Est-ce difficile de se faire une place dans votre secteur aux États-Unis ?

Oui. Il faut faire preuve de beaucoup de persévérance et de persistance, (trait qui déplait parfois selon les cultures), pour sans arrêt développer et maintenir un réseau de contacts dans différents pays, et dans des domaines variés, s’organiser pour être le plus à même de résoudre les problématiques des clients.

Parmi vos différentes expériences d’expatriée, quelle est celle qui vous a le plus appris et pourquoi ?

Créer et diriger ma propre structure est une expérience de formation continue : juridiquement, humainement et socialement. Il s’agit ici de l’acquisition de différentes compétences et savoirs, et/ou de la mise en place de ressources d’assistance administratives et juridiques. (Entrée des clients, facturations, site internet, comptabilité, ordinateurs, stagiaires, collaborateurs…)

Une grande satisfaction est de travailler sur des dossiers qui se révèlent de plus en plus complexes, plus longs qu’en début de carrière, avec des confrères plus expérimentés eux aussi ; et de continuer sans relâche à comprendre, et apprendre. Il faut aussi travailler en gardant le cap d’une double éthique professionnelle.

Qu’est ce qui vous plaît le plus aux États-Unis ? Qu’est ce qui vous plaît le moins ?

Le plus: la facilité des relations et du networking, le grand professionnalisme des confrères avec lesquels je collabore, la rigueur du détail, un grand pragmatisme.
Le moins: L’excès du détail et la complexité qui apparaissent tant dans les relations sociales, qu’au niveau du traitement des dossiers.

Quels conseils donneriez-vous aux futurs francophones qui se lancent dans l’aventure aux États-Unis ?

Ces conseils visent plus directement les aspirants juristes américains.

En premier lieu, je suggère vivement un investissement dans un diplôme de droit américain avant peut-être, de présenter un barreau américain. La France a un système de droit civil codifié et unifié ; aux Etats-Unis il s’agit de « common law » et de superposition de réglementations fédérales, au niveau des Etats et au niveau local. Le système juridique et judiciaire américain est donc particulièrement complexe.

Garder bien en tête que la maîtrise de l’anglais est indispensable pour un stage aux Etats-Unis, que les stages sont soumis à l’exigence d’autorisations de travail aux USA.

Faire preuve de détermination, de curiosité, de l’envie de voir son propre pays de l’extérieur. Apprendre à connaître les différences juridiques, culturelles, une façon de travailler réactive, et pour des clients qui sont souvent basés fort loin géographiquement.

Il convient aussi d’aimer voyager, rencontrer, partager.

Avoir un sens aigu de l’éthique et du professionnalisme dès un début de carrière et le maintenir, quels que soient les défis.

Quels sont vos projets et que pouvons-nous vous souhaiter ?

Continuer à apprendre et transmettre au mieux, en collaborant avec d’autres professionnels et pour le compte de nombreux clients !

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